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La modification des marchés publics
Mis à jour le 15 avril 2024
Charline Le Falher
Alors que la réglementation ne fait plus référence aux notions d’« avenant » et de « décision de poursuivre ». Le terme « modifications du marché » est maintenant utilisé. Malgré ce changement sémantique, les parties devront tout de même conclure un acte semblable pour procéder aux modifications envisagées en cours d’exécution du contrat.
Les six modifications autorisées
La modification du marché marque un accord de volonté, signés des deux parties, ayant pour objet de modifier les dispositions d’un marché public en cours de validité. Les modifications du marché ne peuvent ni bouleverser l’économie du marché, ni en changer l’objet, sauf en cas de circonstances imprévues ou de sujétions techniques imprévues ne résultant pas du fait des parties.
Les règles de modification du marché sont strictement encadrées par le Code de la commande publique. Un marché peut être modifié sans nouvelle procédure de mise en concurrence dans les conditions prévues par voie réglementaire, à savoir :
1/ La modification a été prévue dans les documents contractuels initiaux sous la forme d’une clause de réexamen.
Qu’importe le montant, la modification du marché peut être prévue dans les documents contractuels initiaux sous la forme de(s) clause(s) de réexamen. Ces clauses doivent être rédigées de manière suffisamment claire et précise. Le champ d’application et la nature des éventuelles modifications ainsi que les conditions dans lesquelles elles peuvent intervenir doivent être indiqués.
L’avantage d’une telle clause est de dispenser l’acheteur de procéder à une nouvelle procédure de publicité et de mise en concurrence. Cependant il faut prendre en compte le montant des modifications possibles pour calculer le montant du marché et donc déterminer la procédure de passation.
Cependant, alors que l’acheteur a souvent des difficultés à définir de façon assez précise et fonctionnelle son besoin, il devrait aussi prévoir les modifications qui pourraient affecter celui-ci, et rédiger tout cela de façon claire et précise.
Cette possibilité sera donc utilisée dans des cas assez particuliers, et il n’est pas possible de prévoir cela via une clause générale reprise automatiquement dans tous les marchés.
2/ Des travaux, fournitures ou services supplémentaires, quel que soit le montant, sont devenus nécessaires et ne figuraient pas dans le marché public initial.
L’acheteur peut inclure dans un marché existant des travaux, services, fournitures supplémentaires qui sont devenus nécessaires à condition que ces prestations supplémentaires n’entraînent pas une augmentation du marché supérieure à 50% du montant initial et que le changement de cocontractant soit impossible :
- Pour des raisons économiques ou techniques telles que l’obligation d’interchangeabilité ou d’interopérabilité avec les équipements, services ou installations existants achetés dans le cadre de leur marché initial
- Présenterait un inconvénient majeur ou entraînerait une augmentation substantielle des coûts.
- Serait impossible pour des raisons économiques ou techniques
Ces modifications ne doivent pas avoir pour objet de contourner les obligations de publicité et de mise en concurrence.
3/ Les modifications rendues nécessaires par des circonstances imprévues.
Les circonstances imprévisibles sont des circonstances extérieures qu’un acheteur, bien qu’ayant fait preuve d’une diligence raisonnable lors de la préparation du marché initial, n’aurait pu prévoir, compte tenu des moyens à sa disposition, de la nature et des caractéristiques du projet particulier, des bonnes pratiques du secteur et de la nécessité de mettre en adéquation les ressources consacrées à la préparation de l’attribution du marché et la valeur prévisible de celui-ci.
À la différence des sujétions techniques imprévues, la modification ne doit pas être supérieure à 50% du montant du marché initial (+ modifications successives).
Cela ne doit pas avoir pour objet de contourner les obligations de mise en concurrence et de publicité.
4/ Un nouveau titulaire remplace le titulaire initial du marché public.
Cette possibilité peut d’abord être prévue par la clause de réexamen comme exposé ci-dessus. Ce changement ne doit pas intervenir immédiatement après la conclusion du contrat et avant même le début de l’exécution des prestations sans motif légitime dans la mesure où l’identité du titulaire est un élément déterminant du contrat. La cession de contrat serait alors considérée comme irrégulière.
Dans un deuxième temps, si une clause ne prévoit pas cette possibilité, un tel changement n’est possible :
- Qu’en cas de cession du marché à la suite d’une opération de restructuration du titulaire initial
- Lorsque cela ne modifie pas de manière substantielle le marché et n’est pas effectuée dans le but de se soustraire aux obligations de publicité et de mise en concurrence.
Le nouveau titulaire devra remplir les conditions qui avaient été fixées par l’acheteur pour la participation à la procédure de passation du marché public initial.
5/ Les modifications qui, quel que soit le montant, ne sont pas substantielles.
Une modification est substantielle dans quatre hypothèses :
- Lorsqu’elle introduit des conditions qui, si elles avaient figuré dans la procédure de passation initiale, auraient permis l’admission de soumissionnaires autres que ceux initialement admis ou auraient permis de retenir une offre autre que celle initialement retenue.
- Lorsqu’elle étend le marché, dans une mesure importante, à des services non initialement prévus.
- Lorsqu’elle change l’équilibre économique du contrat en faveur du titulaire du marché, d’une manière qui n’était pas prévue dans les termes du marché initial.
- En cas de changement de cocontractant sauf exceptions
6/ Le montant de la modification est inférieur aux seuils européens et à un certain pourcentage
En plus d’être inférieure aux seuils européens, cette modification envisagée ne doit pas dépasser 10% du montant s’il s’agit d’un marché public de service ou de fourniture et 15% du montant du marché public de travaux initial.
Si ces conditions sont respectées, les parties peuvent conclure un avenant librement qui pourrait porter sur tous leurs engagements, comme les prestations à exécuter ou le calendrier d’exécution.
Si plusieurs modifications successives sont effectuées, le pouvoir adjudicateur doit prendre en compte la valeur cumulée des modifications successives.
Au-delà des seuils énumérés, la modification ne sera pas nécessairement qualifiée de substantielle et par conséquent jugée irrégulière.
En conclusion : En cas de modifications du marché, les parties au contrat doivent conclure « un avenant » qui matérialisera leur engagement à procéder aux modifications envisagées en cours d’exécution du contrat, sauf dans le cas où celles-ci auraient été prévues dans le contrat initial. Dans cette dernière hypothèse, la mise en œuvre de ces modifications sera subordonnée à la seule décision du pouvoir adjudicateur.
À noter que, pour les contrats ayant le caractère de contrat administratif, l’administration peut toujours recourir à son pouvoir de modification unilatérale (articles L. 2194-2 et L. 3135-2 du code de la commande publique).
Les modifications non autorisées : la modification substantielle du contrat
Toutes modifications du contrat, qu’elles soient prévues par la réglementation en vigueur ou non, ne doivent pas pouvoir être considérées comme substantielles, notion définie ci-dessus, c’est-à-dire qu’elles ne doivent pas changer la nature globale du marché.
L’appréciation du caractère substantiel ou non de la modification se fait au cas par cas, en fonction des circonstances de fait dans lesquelles intervient l’avenant.
Un avenant susceptible de changer l’objet du contrat est considéré comme un nouveau contrat qui doit être soumis aux règles de publicité et de mise en concurrence dès lors :
- Qu’il introduit des prestations nouvelles ou non prévues dans le marché d’origine, dissociable des prestations initiales
- Qu’il modifie dans une proportion importante la nature des prestations.
Charline Le Falher, Consultante et Formatrice Commande Public et Achats Responsables
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