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Retour d’expérience - nouvelle forme de contrat public : le Marché Global de Performance

Publié le 4 février 2019

L’Agence Déclic partage son retour d’expérience sur le Marché Global de Performance, une nouvelle forme de contrat public.

Le Marché Global de Performance, késako ?

Il s’agit d’un marché basé sur l’atteinte d’objectifs de performance, mesurables grâce à des indicateurs : le traditionnel CCTP (cahier des clauses techniques particulières) est « délaissé » au profit d’un « Programme Technique et Performanciel ».

S’agissant ici de prestations techniques liées à la voirie, le DCE (Dossier de Consultation des Entreprises) n’a pas prescrit des mètres linéaires de bordures et des mètres carrés d’enrobé, mais a défini des objectifs à atteindre (qualité du service attendu, sécurité générale, amélioration du stationnement…). Charge aux entreprises candidates d’élaborer un scénario et un parti-pris d’intervention.

Pourquoi le MGP (Marché Global de Performance)?

Le Pays de Châteaugiron Communauté (PCC), est confronté, comme toutes les intercommunalités (ou collectivités locales), à de multiples évolutions de ses compétences dans un contexte financier très tendu. Dans le cas présent, la problématique concernait la rénovation, la modernisation et l’entretien des Zones d’Activités, suite à leur transfert à l’intercommunalité.

Le PCC devait donc rechercher un (nouveau) mode d’intervention, (plus) approprié à ce patrimoine, avec un objectif double :

  • Une requalification importante et des remises à niveau des infrastructures ;
  • Une gestion et un entretien du domaine public de ces secteurs optimisés.

Deux solutions principales s’offraient à la Maîtrise d’Ouvrage :

  • Développer la régie pour la partie « gestion » et passer des marchés de maîtrise d’œuvre et de travaux pour les travaux de requalification et de remise à niveau ;
  • Confier, via un marché public, l’ensemble de ces missions, sur la durée.

Notons ici que la Maîtrise d’ouvrage a eu le réflexe de poser les enjeux, d’affiner ses objectifs et d’analyser le contexte, afin de juger ces opportunités d’action en souhaitant optimiser au maximum les ressources humaines et financières du PCC.

Nous avons eu l’immense plaisir d’accompagner la collectivité dans ses réflexions et tout au long du projet, aux côtés de nos 2 partenaires Avoxa et SCE.

Un « scanner » des forces et faiblesses des différentes parties prenantes potentielles a permis de réaliser le constat suivant :

  • Les services sont compétents pour gérer l’entretien des ZA, pour contractualiser et suivre les marchés nécessaires à la requalification ; cependant s’ajoutent d’autres nouvelles compétences et une volonté d’améliorer l’intervention publique dans d’autres domaines. Risque identifié : la croissance de la régie technique ne serait-elle pas trop forte ? Des moyens humains et matériels supplémentaires seraient nécessaires, seraient ils optimisés ?
  • Beaucoup d’entreprises ont développé, au contact des collectivités via les marchés publics, une ingénierie leur permettant, soit en interne soit via des partenariats, de concevoir des projets, les mettre en œuvre et potentiellement gérer les espaces créés.

Risque identifié : les entreprises du BTP sont-elles prêtes pour ce type de marchés globaux ?

L’évolution de la réglementation sur les marchés l’encourageant depuis 2016, le Maître d’Ouvrage a décidé de vérifier la faisabilité de son « intuition » quant à la capacité du monde du BTP à répondre à ce type de marché, en mettant en œuvre une action de sourcing et de benchmarking.

Des rencontres avec la Fédération Nationale des Travaux Publics et ses entreprises, des maîtres d’œuvre, mais aussi l’Institut de la Gestion Déléguée et une collectivité ayant le vécu d’un marché similaire, ont permis d’évaluer positivement la maturité du secteur. Il a également été constaté, au-delà de la capacité à faire, un enthousiasme déjà présent quant au défi que représente cette nouvelle forme de contractualisation. Nous aurons l’occasion d’en reparler dans la seconde partie de ce billet.

La conclusion de cette première phase est que le Marché Global de Performance (MGP) apparaît comme une solution adaptée aux besoins du PCC dans le contexte qui est le sien : un savoir-faire technique, ajouté à une ingénierie pertinente, et une capacité d’innovation sur le domaine des services, pour réaliser à la fois la conception, la réalisation et la gestion de ces zones d‘activités.

La solution d’accroître les moyens de la régie n’a pas été retenue car elle paraissait moins pertinente au regard des évolutions à venir pour les intercommunalités et les collectivités locales. Nous pouvons notamment citer : la baisse des dotations de l’Etat, les diminutions considérables des aides et subventions du Conseil départemental, la  nécessité de maîtriser les budgets de fonctionnement et donc de la masse salariale, la nécessaire maîtrise de la pression fiscale sur les entreprises du territoire et l’anticipation des prochains transferts de compétences comme l’eau et l’assainissement.

Et la place de la Maîtrise d’ouvrage dans tout ça ?

Si le PCC a mené toute cette réflexion, pris le temps d’analyser les modes de gestion potentiels, ce n’est pas pour délaisser son rôle de Maître d’Ouvrage une fois le scénario choisi.

La question de la place prise dans un projet par la Maîtrise d’Ouvrage (MO) est importante, et ne dépend pas seulement du mode de gestion choisi : en effet, un service en régie peut ne pas donner satisfaction si l’ensemble de la MO ne s’investit pas, tout comme une Délégation de Service Public peut être inappropriée si la MO est absente.

« Il n’y a pas de mauvais résultats, mais souvent des mauvaises commandes » rappelle souvent l’équipe du PCC.

Un MGP réussi est un MGP où la MO est forte : le groupement d’entreprises titulaire du marché est un partenaire, pas un Maître d’Ouvrage délégué ! Les 2 parties ont besoin l’une de l’autre pour rendre le meilleur service au public, en particulier les entreprises « résidentes » de ces ZA. Les candidats ont d’ailleurs tous souligné l’importance de garder une MO fortement présente.

D’où l’importance d’impliquer l’ensemble de la MO, ce qui a été le cas sur ce projet : des élus investis pendant toute la procédure, qui ont une grande confiance dans leurs services, focalisés ensemble sur la recherche de la meilleure solution pour leur intercommunalité.

Il s’agit donc d’un critère de réussite primordial : une collectivité qui choisit le Marché Global de Performance car elle ne veut s’occuper de la mission afférente, est à peu près sûre que cela dysfonctionnera, et ce ne sera pas nécessairement de la faute des entreprises, comme cela est parfois dit… A l’inverse, le projet a de grandes chances de réussite si le partenariat est équilibré et que chacun des acteurs joue son rôle.


Nous avons coutume de dire à nos clients que 80% de la performance d’un achat se situe dans la préparation. C’est pourquoi, le projet du Marché Global de Performance de Pays de Châteaugiron Communauté a été mûrement réfléchi. Nous vous en parlions ICI.

Après les indispensables réflexions, place à l’action !

La seconde partie de l’aventure MGP pouvait commencer, avec un sacré défi à relever : Comment transformer le besoin en DCE (Dossier de Consultation des Entreprises), sans perdre la philosophie issue des réflexions amont ?

Marché Global de Performance et Marché à Procédure Adaptée

L’estimation étant inférieure au seuil de la procédure formalisée, le MGP sera un MAPA (Marché à Procédure Adaptée), avec une idée directrice forte : créer les conditions, dès la phase de consultation, de co-construction de la meilleure offre possible, en collaboration avec les candidats.

La solution mise en œuvre fût donc un MAPA dit restreint, librement inspiré de la procédure du Dialogue Compétitif. En clair, il allait se dérouler en 2 phases ; une phase candidature et une phase offre et la solution finale serait construite avec les équipes sélectionnées grâce à 3 tours d’audition des équipes et des offres remises au fur et à mesure du dialogue ainsi instauré. Tout cela, s’étalant sur une durée de 6 mois.

Les élus et les services, très conscients de l’investissement nécessaire en phase offre pour les entreprises qui répondent, ont souhaité que les candidats soient indemnisés à hauteur de 10 000 € chacun.

Le résultat de ce travail collaboratif fût à la hauteur de l’engagement de l’équipe projet (élus et services) et des moyens mis en œuvre (assistance à maîtrise d’ouvrage) : les différents groupements d’entreprises ont relevé le défi et ont immédiatement compris l’intérêt de participer à ce type de consultation : en effet, outre l’aspect commercial, ils ont compris que ce nouveau process de contractualisation allait leur permettre de réinterroger leurs pratiques, tant au niveau technique, organisationnel, que commercial.

Les candidats ont su participer activement et intelligemment aux échanges nourris entre les différentes phases pour préciser et améliorer leur offre, proposer des solutions innovantes ; ils ont expérimenté les auditions, plus souvent dévolues aux marchés de services. Pour cela, 2 formes principales de groupement se sont présentées : d’un côté l’intégration d’un bureau d’études externe au mandataire, de l’autre une ingénierie interne. Conformément au DCE, tous les mandataires (VRD) ont répondu avec des partenaires compétents en signalisation et en espaces verts.

Cette réussite est principalement due à 3 facteurs 

  • Le choix de la procédure de dialogue : les échanges lors des auditions ont permis aux élus de faire passer la philosophie dans laquelle ils souhaitaient travailler et ont créé un climat de confiance propice à l’amélioration continue des offres ;
  • L’exigence portée par le Maître d’Ouvrage quant au détail et à la qualité des réponses attendues, attente satisfaite par tous les candidats ;
  • La posture des entreprises, qui ont compris le sens attendu de l’innovation, celle du service, et non de la technique. Les attentes des élus se situent en effet ici, car ils sont convaincus de la qualité de l’ingénierie du secteur du BTP (ce n’est pour eux pas une question). Même si le changement de paradigme est encore incomplet, il est important de souligner le virage que la profession commence à prendre.

Le troisième volet, la mise en œuvre de ce Marché Global de Performance, s’ouvre aujourd’hui pour le Pays de Châteaugiron Communauté, le vécu viendra t’il confirmer ce bon début ? L’avenir nous le dira.

Si c’était à refaire, qu’est-ce que l’on changerait ?

Comme il s’agit du premier Marché Global de Performance sur ce type de prestation, le maître d’ouvrage a interrogé certains candidats sur la façon dont ils avaient vécu la procédure. Tous ont souligné le plaisir qu’ils ont eu à répondre et ont évoqué les points d’amélioration suivants :

  • Augmenter de quelques jours les délais entre les différentes auditions et réponses aux questions ;
  • Apporter encore plus de précisions sur les données techniques d’entrée (plans topographiques par exemple) ;
  • Réévaluer légèrement l’indemnité due aux candidats retenus pour la phase offre.

Le PCC rejoint les entreprises sur leurs retours d’expérience et les partagera avec les collectivités qui souhaitent se lancer dans ce type de procédure, et avec la Fédération Nationale des Travaux Publics, afin que les prochains MGP soient encore meilleurs, dans l’intérêt de tous les acteurs des territoires.


La définition du Marché Global de Performance

En résumé, les marchés publics globaux de performance associent l’exploitation ou la maintenance à la réalisation ou à la conception-réalisation de prestations afin de remplir des objectifs chiffrés de performance définis notamment en termes de niveau d’activité, de qualité de service, d’efficacité énergétique ou d’incidence écologique. Ces marchés publics comportent des engagements de performance mesurables.

ça, c’est la définition réglementaire. C’était un peu court pour se lancer sans préparation dans un des premiers MGP français. En plus du sourcing et du benchmarking, nous nous sommes beaucoup documentés.

Quelques ressources sur le Marché Global de Performance

Cet article est donc l’occasion de partager avec vous ces ressources :

  • La base réglementaire :
    • l’article 34 de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics et l’article 92 du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics
    • le décret n°2017-842 du 5 mai 2017 portant adaptation des marchés des maîtrise d’oeuvre aux marchés publics globaux
  • La plaquette de l’IGD « Marché global de performance – Infrastructures routières et voirie »
  • La fiche pratique de France Marchés Publics sur la procédure de dialogue compétitif
  • Le livret de l’IGD sur les marchés globaux

Enfin, et la boucle sera bouclée, vous pouvez aller lire les publications issues de notre expérience :

 

Photo by Susan Yin on Unsplash